Juillet 1940

Le bruit du verre cassé se fracassant sur le sol brisa brusquement le silence de la maisonnée, ce qui réveilla inévitablement le jeune Theodore qui s'était d'ailleurs endormi difficilement après avoir dû subir le désagréable vacarme des cris provenant de la cuisine un peu plus tôt. La cause était évidente pour ceux qui connaîssaient bien la famille Romanov, mais nous y reviendrons plus tard. Curieux de découvrir ce qui avait produit ce bruit soudain, il se leva en vitesse et se dirigea spontanément vers une pièce en particulier. Monsieur Cassimir Romanov était absent la moitié du temps, toujours occupé à voyager dans le cadre de son travail. C'était un pilote d'avion qui se dévouait corps et âme à son métier. Sa fille biologique (car Theodore était adopté), Sofia, avait quittée le logis familial la soirée même, mais ça, Theodore ne le savait pas encore. Il avait seulement entendu sa nouvelle soeur dire quelques mots avant de fermer violemment la porte d'entrée, mais de là à se dire qu'il ne la verait plus pour un temps indéterminé, cela n'avait pas traversé son esprit une seconde. Après tout, ce n'était pas la première fois que ses paroles étaient plus menaçantes que ses actions. L'enfant savait de ce fait qu'il était seul avec Delyana, sa mère adoptive, et qu'elle était sans doute reliée au fameux fracas. Il ne la trouva cependant pas dans sa chambre et il continua donc son chemin vers une autre pièce lorsque la salle de bain toujours éclairée attira son attention. Même si la porte était close, il voyait la lueur aveuglante des néons passée à travers les fissures de celle-ci et, hâtivement, il s'approcha. D'une voix légèrement inquiète, il s'exclama:

« Delyana? Delyana, tout va bien? »

Il était bien désormais l'un des seuls être dans ce monde à la nommée ainsi, mis à part bien sûr pour Cassimir. C'était leur privilège. Aucune réponse ne se fit entendre même après plusieurs tentatives et le silence devint de plus en plus pesant. Theodore était assez intelligent malgré son jeune âge pour comprendre que quelque chose n'allait pas du tout. En temps normal, la sorcière - car c'en était une, mais nous y reviendrons aussi - était très protectrice envers lui et elle ne se serait jamais permis de lui taire sa présence. La panique s'empara petit à petit de ses entrailles et il essaya avec force de défoncer la porte, sans succès. Après un moment de frustration, il sortit de la maison à la recherche d'un adulte pour l'aider. Madame Addams était assise sur sa galerie, un bouquin dans les mains. Elle était tellement concentrée dans sa lecture, que la voix du gamin la fit sursauter, mais lorsqu'elle comprit la situation, elle le suivit sans hésiter. Elle était tout aussi alarmée que lui, bien sûr, mais à la foix excitée d'entrer dans la grande et mystérieuse demeure des Romanov. Ils se montraient si rarement et étaient si peu socials qu'ils étaient une véritable source de potins pour le voisinage. Il fallait aussi dire que les étranges accoutrements de Delyana et ses extravagants chapeaux pointus ne laissaient personne indifférents. Madame Addams n'eut pas beaucoup de temps pour contempler les lieux, car Theodore lui tirait vivement la main pour qu'elle le suive à la course, mais elle se jura avoir apperçut du coin de l'oeil un personnage à la longue moustache la suivre du regard sur l'un des nombreux tableaux du couloir. Elle chassa pourtant vite cette ridicule pensée et se retrouva face à la porte désirée.

« Madame Romanov, ouvrez immédiatement! Je suis votre voisine, Madame Addams. Votre fils s'inquiète à votre sujet. »

Theodore soupira. Si sa mère adoptive ne lui avait pas répondu à lui, pourquoi répondrait-elle à une futile étrangère?

« N'avez-vous rien pour ouvrir cette porte?! »

Madame Addams sortit une clé quelconque de sa poche. Peut-être la serrure acceptait-elle n'importe quelle clé. Rien, elle restait toujours verrouillée! Elle utilisa la bonne vieille méthode de la bobépine. C'était toujours inefficace. Theodore, n'en pouvant plus, vint devant la porte et hurla tout en la cognant de ses deux poings fermés:

« Mais merde, ouvre-toi! »

C'est alors que quelque chose se produisit que ni Theodore ni Madame Addams n'aurait soupçonné possible. La porte disparut au contacte du garçon! Comme ça, pouf, disparut! Madame Addams ne comprit jamais cet absurde événement, mais Theodore découvrit plus tard que c'était sa nature magique qui avait été révélée pour la première fois. Ils n'eurent pas le temps de réagir à cette disparition, car la vision qu'ils avaient désormais sous les yeux suffisait à les impressionner encore plus. En fait, le mot impressionner serait très mal choisit dans ce contexte. Une expression de terreur plutôt était née sur leur visage. Theodore était bouche bée, complètement dégoûté et pétrifié devant le spectacle qui s'offrait devant lui. Madame Addams, tant qu'à elle, arrivait à peine à retrouver une respiration régulière et elle avait une main d'épouvante devant la bouche. Un long hurlement strident sortit de celle-ci et elle s'enfuit à toute jambe vers le salon. Cherchant le téléphone, elle s'empara du combiné et composa le 911, la main tremblante, l'image cauchemardesque de la dame Romanov toujours vive dans son esprit. Ses membres avaient gonflés et on aurait put croire que son visage avait été piqué par une armée de guêpes enragées! Elle avait perdue toute beauté et toute conscience aussi.

« Bonsoir, service d'urgence. »

« Envoyez une ambulance, vite! Au... au 4555, Pudding Lane. C'est ma... ma voisine, elle... elle a but quelque chose et... et son visage, il est... il est défiguré, mon Dieu! »

« Calmez-vous, respirez; l'ambulance est en route. »

Mon nom est Delyana Romanov, mais dans la vie de tout les jours on m'appelle plutôt Madame Romanov ou bien Professeur Romanov, cela dépend de votre situation. Je suis bulgare et mon mari, Cassimir Romanov, est russe. J'ai fais sa connaissance surtout en angleterre; notre rencontre fut à vrai dire bien peu commune, car, après tout, nous ne faisions pas réellement partit du même univers. Presque toute ma vie, j'ai uniquement côtoyée des sorciers. Ils étaient souvent riches et bien éduqués; en somme, prétentieux et exaspérants. J'ai fréquenté l'école de sorcellerie de Durmstrang, en Bulgarie, où j'ai été initiée à la magie noire et à l'importance de la pureté du sang. Avant l'âge de 16 ans, j'étais complètement ignorante concernant le mode de vie et la culture des moldus. Dans mon monde, l'existence de la science, de la technologie et du ménage, c'était de la pure folie. Nous, nous avions la vie facile avec nos potions, nos sortilèges et nos elfes de maison. J'ai quittée à un jeune âge mes parents, car j'étais simplement écoeurée de cette vie étouffante, pleine de préjugés et d'exigences inutiles. Mais ce qui m'a surtout poussée à partir, c'était le lourd secret qui pesait sur notre famille. Mon père, cet homme que j'espère ne jamais revoir, était un homme très violent qui battait ma mère et nous brutalisait moi et ma soeur. Il était très contrôlant et colérique. C'était un dominateur qu'il ne fallait jamais contredire. Ma mère jouait à la bonne femme soumise tout comme ma soeur. J'étais la seule qui osait lui tenir tête et, même si je me lamentais sur mon sort par la suite, la sactisfaction de me sentir libre (et je dirais même rebelle) me poussait à recommencer. Cette hardiesse m'a valut des marques de blessures permanentes sur le corps qui m'ont énormément faites souffrir. Ils me rappellent des souvenirs douloureux, certes, mais je ne regrète pas une seconde mon audace. Il méritait ces crachats au visage et ces paroles pleine de ce venin qu'est la vérité. J'ai voulue être une meilleure mère pour ma fille, Sofia, mais je me suis revue en elle lorsqu'elle nous a quittée avec ses valises après notre énième querelle. L'ai-je tant négligée que ça? Pourquoi me haît-elle à ce point? Suis-je vraiment le portrait de ma mère? Je sais, je l'ai quittée - elle et mon père, bien sûr - pour différentes raisons, mais cette scène avait quelque chose de si familier, quelque chose qui m'a littéralement brisé le coeur. J'espère tant qu'elle reviendra et qu'elle saura me pardonner...

Après m'être retrouvée à la rue à l'adolescence, j'ai quêtée de l'argent pour m'acheter un billet de train en direction de Londres, en Angleterre. Complètement paumée au milieu de cette ville que je connaissais très peu, un beau jeune homme un peu plus âgé que moi que j'avais rencontrée dans le train m'avait aimablement offert la posibilité de visiter Londres à ses côtés. C'était Cassimir, vous l'aurez deviner. C'était l'un des premiers moldus à qui je m'adressais et il était... extraordinaire! C'était un homme passionnant, à l'écoute, charmant. Bref, le parfait gentleman. Il venait à Londres pour un stage d'aviation et pour un potentiel emploi. Le mot aviation ne me disait absolument rien, mais plutôt que de juger mon ignorance, il m'expliqua très gentiment en quoi consistait son travail, quoiqu'avec trop peu de détails. J'avais tant envie d'en savoir plus sur les avions: comment ils fonctionnaient, si cela était dangereux de les piloter (c'était apparemment le mot qu'il fallait utiliser) et même à quoi ils ressemblaient. Il fut scandalisé d'apprendre que je n'avais jamais prit l'avion de ma vie (et je n'avais pourtant pas osée lui dire que je n'en avais même jamais vu un réellement!) et il n'hésita pas à m'inviter un jour à embarquer dans un hélicoptère avec lui. Je fis semblant de savoir ce qu'était un hélicoptère en lui souriant bêtement tout en le remerciant.

Mon idée première en venant à Londres avait été de faire une surprise à mes grands-parents en venant leur rendre visite... de façon permanente. Durant le souper, je m'inviterais plus ou moins subtilement à m'installer chez eux le temps de finir mes études, ce qui, en fait, s'étendait sur quelques années encore. Mais tout ne se passa pas du tout comme je l'avais espérée. En arrivant chez ma baba (mamie) et mon dyado (papi), comme je les avais toujours nommés depuis ma tendre enfance (dans ma langue maternelle), l'acceuil fut tout sauf chaleureux. Baba particulièrement était en colère après moi. Apparemment, ma mère l'avait appelée en larmes et lui avait tout racontée. Je ne veux pas m'éterniser sur le sujet, mais ils refusèrent obstinément de m'héberger et m'obligèrent presque à retourner en Bulgarie pour régler mes problèmes familiaux. Cassimir eut beaucoup de compassion pour moi et me proposa de venir vivre avec lui le temps que je trouve un travail et que je puisse payer une part du loyer. Je me sentais très gênée d'entrer dans l'intimité d'un jeune homme séduisant, certes, mais qui était toujours un inconnu malgré tout et je décida de refuser son offre. Cependant, après mûre réflexion, je n'avais vraiment nul part où aller, alors j'accepta de dormir sur son sofa pendant plusieurs mois. Ensuite, bon... je suis montée pour la première fois dans un hélicoptère et c'était merveilleux! Ensuite, je me suis trouvé un emploi comme serveuse dans un restaurant. Par la barde de merlin, c'était franchement pénible de ne pas pouvoir utiliser la magie! Mais quand il n'y avait personne pour me voir, je trichais, bien évidemment. Et ma baguette magique m'a sauvée de bien des situations et m'a même aidée à être une employée exemplaire. Mais je ne pouvais pas continuer ainsi indéfiniment... Cassimir m'encourageait constamment à retourner aux études et je me défilais en lui disant que j'allais y retourner lorsque j'aurais moins de travail. Mais j'étais appréciée là-bas et je n'en manquais jamais! Finalement, je dû dire la vérité à Cassimir concernant ma véritable nature. Je m'attendais à un rejet de sa part, mais au contraire, je l'ai fasciné au plus haut point. J'écrivis donc une lettre au directeur du collège Poudlard à cette époque, lui expliquant ma situation et le suppliant presque de me permettre d'étudier là-bas, même si j'avais déjà entamée cinq années à Durmstrang. Avec beaucoup de bonté, je fus acceuillit chaleureusement, comme seul Poudlard semblait pouvoir le faire d'une façon si spéciale. J'ai adorée mon expérience dans cette très belle école et je me suis fais plusieurs amis aussi, mais l'absence de Cassimir était un véritable dilemme. Il me manquait terriblement et j'avais si peur qu'il tombe amoureux d'une autre femme durant le temps de notre séparation. Lorsque nous nous retrouvions, c'était l'amour fou. Un mélange d'amour passionnel et rationnel. Nous parlions déjà après un an de fréquentation de mariage et de famille. Nous savions que nous avions trouvé l'être qui nous complétait. C'était magique et pourtant, ironiquement, la magie n'avait rien à voir avec ça! Je poursuivis mes études en enseignement des soins aux créatures magiques. J'avais déjà une certaine expérience avec ces derniers puisque la fortune de ma famille provenait principalement de leur élevage d'hypogriffes. Ils me passionnaient vraiment. Lorsque je vivais en Bulgarie, les hypoggriffes avaient été ma source de réconfort. J'étais particulièrement attachée à l'un d'entre eux que j'avais nommé Svoboda, ce qui signifie ''Liberté''. Il était affecteux, me permettait d'aller sur son dos et de m'envoler avec lui et il était l'image même de l'espoir à mes yeux, car avec ses ailes il était libre d'aller où il le désirait. Je l'enviais et je m'étais promis de m'enfuir véritablement un jour. Mon seul regret est de l'avoir laissé derrière moi, mais je voulais aller à Londres, cette grande ville urbaine, et son entrée aurait été remarquée. Un jour, peut-être, irais-je le retrouver en cachette et l'amènerais-je avec moi jusque dans un endroit secret où je pourrai prendre soin de lui. En espérant qu'il soit toujours vivant et qu'il soit toujours avec ma famille... C'est un de ces rêves d'adolescentes que je sais irréalisable, mais qui reste quelque part dans mes pensées malgré tout.

Je tomba enceinte de Sofia de façon innatendue et ce fut une belle surprise. J'ai cependant trouvée difficile de devoir rester à la maison avec elle, car mon travail me manquait beaucoup et les absences de Cassimir commençait déjà à se faire de plus en plus fréquentes. Je me sentais comme une mère monoparentale, constamment fatiguée et coincée entre quatre murs, prisonnière. J'ai fais une dépression durant cette période et j'ai dû refilée ma fille aux parents de Cassimir qui étaient venus le visiter de la Russie. Ils voulaient rester à Londres durant quelques mois, le temps des vacances d'été et pour profiter de leur retraite qui commençait à peine. Ayant beaucoup de temps libres, les premières années de Sofia furent surtout auprès d'eux (puisqu'ils décidèrent finalement de s'installer eux aussi à Londres pour être plus proche de leur fils et de notre famille) et je la repris véritablement à l'âge de 3 ans. Je ne voyais ni mon mari ni ma fille durant la période scolaire où j'enseignais à Poudlard (ce qui équivalait à 9 mois), mais c'était toujours un bonheur de les retrouver. Même si c'était difficile d'être loin d'eux, j'aimais beaucoup trop mon travail pour le quitter. J'avais aussi une confiance inébranlable en Cassimir qui m'avait toujours été fidèle. Sofia, tant qu'à elle, s'était habituée à être plutôt indépendante et à ne me voir que quelques mois par année. Elle ne m'avait jamais dit qu'elle en souffrait à ce point jusqu'à ce jour... J'essaie de me sentir coupable à ce sujet, mais je n'y arrive pas. Ne plus enseigner cette matière que je chérie tant serait comme m'enlever une partie de mon identité. Je ne pourrais simplement pas le supporter! Mais comment puis-je exiger d'elle qu'elle comprenne ma vision des choses? Elle est si jeune encore...

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